Répondant à une évolution sociologique et à l’aspiration d’une majorité de salariés d’accéder au télétravail, les ordonnances Macron sont venues renforcer, en 2017, la loi Warsmann de 2012 qui elle-même reprenait en partie l’accord national interprofessionnel (ANI) de 2005.
D’exception le télétravail devient une modalité de droit commun. Pour répondre à des contraintes personnelles, tout salarié occupant un poste compatible avec un travail qu’il est possible d’accomplir chez soi peut demander à bénéficier du télétravail. Dans les conditions prévues, bien entendu, par un accord collectif ou par charte. L’employeur peut refuser mais à condition de motiver, c’est-à-dire de justifier son refus. Il doit, dans ce cas, apporter la preuve de l’incompatibilité du travail avec le poste du demandeur. L’article 21 de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a par conséquent rendu l’accès au télétravail beaucoup plus facile. Au lieu lieu de se limiter au contrat de travail, le télétravail doit dorénavant fait l’objet d’un accord collectif ou à défaut d’une charte pouvant être adoptée unilatéralement après consultation du Comité social et économique (CSE).
Mais, de nombreuses entreprises dont Adecco se sont précipitées sur cette possibilité, l’obligation de prise en charge des frais directement liés au télétravail (abonnement internet, téléphone, chauffage, électricité, surface de logement dédiée…) prévue par l’article L1222-10 du Code du travail a été supprimée par l’ordonnance citée.
Ce contexte juridique ayant été posé, revenons à Adecco. L’adhésion à la démarche du groupe expérimental Paris-Ile-de-France semble totale et le taux de satisfaction des collègues Adecco concernés par le télétravail devrait avoisiner la moyenne nationale qui s’élève quand même à 96%. Les semaines des agences concernées s’organisent autour du télétravail et les équipes déclarent bénéficier d’un gain d’autonomie appréciable en même temps qu’une meilleure qualité de travail obtenue grâce à une moindre perte de temps.
Un bonheur n’étant jamais parfait, les équipes mentionnent quand même quelques difficultés inhérentes à cette organisation du travail. Tout d’abord, du point de vue de l’effectif, l’absence d’un collègue dans une structure de trois permanents remet souvent en question le télétravail, ce qui n’est pas un mince écueil. D’autre part, la vie de l’entreprise et des salariés limite fortement le nombre de jours potentiellement dédiés au télétravail. L’exclusion du lundi, journée de démarrage de la semaine, du mercredi, afin d’éviter le conflit vie privée (garde d’enfants, par exemple) vie professionnelle et du vendredi à passer en agence, limite finalement les possibilités de travail au mardi et au jeudi.
Donc pour résumer les limites, le télétravail ne porte idéalement que sur deux jours de la semaine et à condition que les petites équipes soient au complet. En revanche, il faut souligner la grande satisfaction des salariés évitant trajets et bouchons, le gain de temps considérable et un travail sans doute plus qualitatif encore. Nous ajouterons, de notre point de vue, une diminution du risque routier par un moindre temps passé sur la route et un important bénéfice pour l’environnement. Imaginons, à terme, deux, trois, quatre ou même cinq millions de véhicules en moins sur les routes chaque jour…
Nous déplorons néanmoins que l’entreprise ait profité des mesures prévues dans l’ordonnance citée pour se dispenser de la moindre contrepartie financière au télétravail. Le salarié assume seul les surcoûts liés au télétravail : lumière, électricité, chauffage toute la journée – sans doute le poste de coût le plus important l’hiver -, l’espace dédié au domicile… Tout cela, c’est cadeau pour l’entreprise, au prétexte que le salarié fait l’économie des frais de déplacement. Cet argument ne tient évidemment pas pour tous les salariés demeurant à proximité de leur agence ou bénéficiant d’un abonnement pour les transports en commun (à Paris ou ailleurs). Seule cette pingrerie vient ternir l’évaluation globalement positive qu’ont les salariés du télétravail. Nous réitérons notre demande auprès de la direction d’une prise en compte des importants surcoûts générés par le télétravail et aujourd’hui entièrement à charge du salarié. L’analyse comparative, avant et après télétravail, des factures de chauffage-électricité des mois d’octobre à avril, par exemple, devrait suffire à convaincre chacun de la nécessité de cette prise en charge.
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La CFE-CGC n’a pas signé le Protocole d’accord préélectoral
Tout est bon pour faire des économies m, sous prétexte que les salariés sont contents de travailler chez eux. Faut-il néanmoins systématiquement que le collaborateur chez Adecco ait l’impression que l’entreprise ne cesse de vouloir faire des économies sur son dos ?