En seulement un an, la moyenne de la loyauté professionnelle des cadres à l’égard de leur employeur a reculé de près de 4 ans, d’après le Cadromètre de Randstad et Ipsos, publié en juin 2024. Comment expliquer un tel recul ? Outre les facteurs habituels, comme une rémunération insuffisamment élevée, le directeur général de Randstad, Gaëtan Deffrennes, a identifié trois phénomènes. Décryptage.

Les cadres français se projettent moins longtemps au sein d’une même entreprise. Ils sont loyaux à leur employeur, mais pas plus de 10 ans en moyenne ! Cette durée a reculé de 4 ans entre 2023 et 2024, passant de 14,1 ans à 9,7 ans, d’après la 3ème édition de l’étude Cadromètre*, menée par Randstad Search et Ipsos, publiée en juin 2024. Si on savait ces actifs de plus en plus volatiles, cette tendance se renforce année après année. Les premiers motifs de départ restent la rémunération, l’équilibre des temps de vie et l’ambiance au travail. Mais, des raisons émergentes expliquent ce recul de la loyauté.

Génération Z

Tout d’abord, le nombre de jeunes cadres issus de la génération Z, de plus en plus nombreux sur le marché du travail, « font baisser la moyenne », affirme Gaëtan Deffrennes, directeur général chez Randstad. « C’est mathématique, plus les années passent, plus ces jeunes commencent à travailler. Et ils arrivent en entreprise avec de nouvelles aspirations, dont celle de vivre des expériences professionnelles variées. Ils n’hésiteront pas à changer d’entreprise pour le simple plaisir d’essayer autre chose. » En effet, les 18-34 ans déclarent qu’ils ne comptent pas franchir le cap des 7 ans dans la même entreprise, tandis qu’un tiers d’entre eux dit vouloir changer de structure dans les 6 mois qui suivent leur embauche.

Autre explication ? Ils sont attachés à certaines valeurs, et s’attendent à ce que leurs missions correspondent exactement à ce qui était indiqué dans la fiche de poste au moment du recrutement. Ainsi, « ils sont capables de quitter une entreprise si finalement ils n’adhèrent pas aux valeurs de leur structure, au mode de management en place, ou encore s’ils sont insatisfaits par les tâches confiées. »

Dernière raison, et pas des moindres, selon Gaëtan Deffrennes : « Beaucoup déplorent qu’on leur en demande trop et trop vite. Certains, confrontés à un épuisement professionnel, s’en vont rapidement. Il n’est pas rare d’observer que cette première expérience les déçoit au point de changer de voie ! »

Besoin de changement

Si leurs aînés ont moins le réflexe de changer d’entreprise, ils aspirent toutefois à « bouger » au sein de leur organisation. Autrement dit, à évoluer fréquemment sur de nouvelles missions, voire de nouvelles fonctions. Les attentes en termes de formation, afin d’acquérir de nouvelles compétences leur permettant d’accéder à cette évolution, sont particulièrement élevées. D’après la récente étude Cadromètre*, 66 % des cadres ont décidé de se former cette année. « S’ils ont le sentiment de stagner trop longtemps, sans opportunité de changement, eux aussi finiront par partir », commente le dirigeant de Randstad.

Contexte instable

Enfin, dans un contexte où les crises s’enchevêtrent, les cartes peuvent être rebattues à tout moment. C’est pourquoi, même si près de 7 cadres sur 10 déclarent se sentir bien dans leur entreprise, tous gardent un œil attentif sur les opportunités du marché. « Ils ne se ferment aucune porte, note Gaëtan Deffrennes. Au regard de la pénurie de main-d’œuvre sur le marché des cadres, certaines entreprises vont jusqu’à solliciter les cadres expérimentés. Ces derniers reçoivent des opportunités sans même candidater. »

Ce contexte inflationniste amène, par ailleurs, certaines entreprises à revoir leur budget à la baisse. Conséquence ? Près de 3 cadres sur 4 (74 %) se disent sur-sollicités et ressentent une surcharge cognitive au travail. Une majorité se retrouve « à devoir fournir plus de travail, sans pour autant être payée davantage. Ils se remettent à chercher un emploi, et finissent par partir », indique le patron de Randstad.

A noter, toutefois, que la loyauté professionnelle prend des allures inattendues. La tendance des « salariés boomerang » (employés quittant une entreprise avant d’y revenir quelques mois ou années plus tard) ne se dément pas. Voire, elle augmente. En 2024, 20 % des cadres ont déclaré être déjà retournés dans leur précédente entreprise, tandis que 63 % seraient prêts à retourner travailler pour un ancien employeur. Les entreprises, de leur côté, ne se privent pas de ces ressources immédiatement opérationnelles.

*L’enquête a été menée par l’Institut de sondage Ipsos auprès d’un échantillon de 1200 cadres actifs du secteur privé, dont la rémunération annuelle fixe est de 35K bruts minimum s’ils vivent en province et de 40K brut minimum s’ils vivent en région parisienne. La représentativité de l’échantillon est assurée par un quota raisonné de 100 cadres par région. Le sondage a été réalisé en ligne entre le 1er et le 22 février 2024.

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