Au début, lorsque tombe la dépêche de Zonebourse, l’on préfère très lâchement ne pas y croire et on en vient presque à pester contre ces journalistes tantôt approximatifs, tantôt excessifs. Puis, en croisant les informations, il faut bien se résigner à accepter ce qu’on lit : le très endetté groupe Adecco emprunte encore 300 millions d’euros (281 millions de CHF) sur 8 ans, soit près du tiers d’un milliard. C’est par la filiale néerlandaise Adecco International Financial Services B que s’est effectué le montage.

Le groupe – monde bien sûr et non la France – a placé, avec succès nous précise-t’on, une émission obligatoire de 300 millions d’euros pour se refinancer et, accrochez vos ceintures, “financer les besoins généraux de l’entreprise et faire face à de prochaines échéances de remboursement (de la dette, NDLR)”. Voici donc un groupe, endetté plus de quatre fois comme l’un des trois majors de la profession et presque deux fois comme l’autre, qui emprunte pour boucler ses fins de mois (“faire face à ses échéances“) et contribuer à rembourser sa dette colossale.

Même les plus importantes agences mondiales de notation financière, d’ordinaire plutôt bien disposées, commencent à renâcler puisque Moody’s évalue la situation selon la notation Baa1, avec perspective stable mais Standard & Poor’s se contente de BBB, avec perspective négative. Rien de bien rassurant.

Pour comprendre pareille manœuvre, il faut avoir à l’esprit que le groupe reverse sous forme de dividendes aux actionnaires près de 90% de ses résultats nets. Un record dans la profession d’autant que, nous l’avons plusieurs fois évoqué ici, sa direction s’est engagée auprès des actionnaires à maintenir le niveau de dividende quelles que soient la conjoncture et l’état de santé du groupe. Quitte à emprunter pour verser les dividendes et c’est précisément ce qui nous occupe ici.

Pour faire simple et concis, le groupe subit aujourd’hui les conséquences d’erreurs successives qu’il serait fastidieux de toutes lister : investissement calamiteux sur General Academy en 2018, dépréciations successives de LHH – qui avait lui-même englouti Altedia, l’un des fleurons français du conseil – s’élevant maintenant à plusieurs dizaines de millions d’euros, acquisition à un montant exorbitant du groupe Akka au titre d’une synergie et d’une complémentarité dont les effets bénéfiques tardent à se manifester… On continue ? On vous parle de Qapa, des hubs, de la démolition (in)contrôlée des activités BTP et tertiaire, des effets dévastateurs du turn-over et de son corolaire, la perte de compétences, des systèmes de rémunération tirés par rafales sans grand succès, etc… ?

Aujourd’hui, on ne joue plus. Compte tenu du niveau d’endettement du groupe, il apparait clairement à nos experts que le plan d’économie en cours ne suffira pas, d’autant que l’état du marché et la dégradation de notre Ebita laissent peu de perspectives de redressement à court terme. Nous venons d’apprendre, il y a seulement quelques heures, les difficiles décisions prises à l’encontre de Adecco Groupe France (AGF), un bien mauvais présage pour les équipes Solution que nous représentons et défendons au mieux.

Seule consolation au niveau du groupe : il continue à gagner des parts de marché alors que l’entité France en perd depuis une quinzaine d’années. Cela n’empêchera pas quelques parachutes (dorés on non) de claquer prochainement dans le ciel de Zurich et de Villeurbanne…

Quoiqu’il en soit, vous savez pouvoir compter sur vos élus CFE-CGC, plus mobilisés que jamais et ne saurions trop vous conseiller de nous rejoindre, au moins par le premier des engagements : l’adhésion à notre organisation. N’attendez pas demain, rejoignez-nous !

16 Commentaires

  1. et bien il va y en avoir des parachutes dorés pour les pontes du groupe ! mais pas pour nous pauvres DA ou cadres besogneux … ou alors un peu de sous sur un PSE pour Adecco France

  2. A quand un PSE ? Ceci n’est pas souhaitable, les grands gagnants seraient encore les mêmes. Pas besoin d’une casse sociale en ce moment, si vous trouvez que tout va bien Ok, mais paradoxalement malgré la pénurie de ressources, il faut mesurer ce que vous avez.

    Dans tout les cas bon courage

  3. A la lecture de cet article on a l’impression qu’Adecco est au bord de la faillite.
    Oui, la situation est tendue mais peut on parler de catastrophisme ?
    Le groupe doit certainement rembourser des emprunts à échéance dans un contexte de baisse d’activité en France mais cela annonce t il un PSE de grande empleur ?
    Ou alors certains ont des infos qu’ils cachent depuis longtemps.
    Un peu l’impression de découvrir une situation critique comme Michel BERNIER qui a découvert l’ampleur des 60 milliards d’économie à réaliser.
    La seule info valable c’est comment peut on laisser une société reverser 90% de ses résultats nets à ses actionnaires sans lancer un droit d’alerte ?

    • Bonjour Philippe
      Trouvez-vous normal que votre entreprise soit obligée d’emprunter alors qu’elle gagne de l’or en barre??

      • Les pleurnichard aiment leurs entreprise et ont décidé de rester contre vent et marée, s’investissant au niveau syndical pour tenter de défendre leurs collègues, et essayer d’influencer autant que faire ce peu les décisions de nos dirigeants. Les pleurnichards ont le courage de rester et de s’exposer à contrario beaucoup de nos collègues sont partis pour mieux ou pire (par fierté il ne disent que pour du mieux). Merci de votre soutient Mr JOYEUX

        • Oh oui le courage de rester, respect à ce niveau ça s’accroche bien même très bien
          Je te rassure en général on trouve bien mieux mais encore faut il décrocher c’est plus compliqué. Il paraît même que vous croyez encore attirer la concurrence 😂😂😂

  4. Cher Philippe Martinou,

    Merci pour votre message plein de pondération mais il me semble important d’y réagir en quelques mots.
    Nous ne pensons pas que Adecco soit au bord de la faillite, tout au moins à court terme, mais il n’empêche que le groupe est aujourd’hui champion de l’endettement dans la profession et que, le moins qu’on puisse dire, c’est que les acquisitions et orientations de ces dernières années doivent à minima interroger. Oui, nous sommes à la veille de réorganisations de grande ampleur et, oui il y aura de la casse. Dès la semaine prochaine nous communiquerons sur le sujet.

    Nous ne découvrons rien et, au contraire, alertons depuis de nombreuses années – nous sommes d’ailleurs les seuls, rendez-nous cette grâce – et nous affirmons simplement que la situation devient problématique dans un contexte de ralentissement de l’activité et d’incertitudes sur l’avenir. Chez nous, pas de confortable déni, ni de langue de bois mais des analyses en temps réel et le courage de nommer les choses.

    Vous prenez l’exemple politique d’un Michel Barnier qui feint de découvrir une situation financièrement désespérée, même s’il n’ose employer ce terme. Notre pays est ruiné, il le sait, cela a été dit par d’autres, et sa situation est pire que celle de la Grèce au moment de sa reprise en main par les financiers. Après des décennies de démagogie, de gabegie et d’incompétence (encouragées par les votes à chaque échéance électorale), il y a toujours un moment où il faut passer à la caisse mais ce n’est pas notre sujet ici. Fermons la parenthèse.

    Nous vous rejoignons sur la possibilité sinon nécessité d’un droit d’alerte économique pour mettre fin à ce qui peut s’apparenter à un pillage organisé.
    Arnaud

    • Bonjour CFE CGC

      Vous avez participé ( comme moi) aux richesses de votre entreprise … vous êtes « piqué » au valeur de votre entreprise., mais surtout avec ce bonheur de donner du travail à vos collègues intérimaires.
      Pensez-vous que les actionnaires ont la même vision que vous?
      La révision de la convention collective concernant le positionnement est bien un exemple… chaque poste est dilué dans grande soupe.
      J’étais rémunéré 3000€ x13 plus primes en 2005!! Ça doit faire rêver certains de vos adhérents.
      Défendez les salarié de terrain ou faites comme moi … créer votre ETT.

  5. Les réorganisations ont les connaît deja:
    – fusion de certaines zones
    – fusion de certaines do
    – fermeture de centres de recrutement
    – regroupement managerial de certains agences
    – départs de personnels administratifs en do, dz, au siege
    – fin des stagiaires, fin des cdd, suspension des recrutements
    – …
    Bref tout ce qu’à déjà fait Adecco depuis 20 ans quand cela allait mal.

  6. Vraiment triste d’en arriver là mais outre les problèmes financiers, le problème est aussi managerial.
    Beaucoup de bons , voire très bons éléments sont partis avant un futur PSE inéluctable en négociation autant que faire se peut des indemnités supra légales.
    Adecco fait depuis quelques temps des licenciements individuels déguisés en rupture conventionnelle à l’initiative du salarié.
    Conclusion : mieux vaut partir avec quelques € pendant que le bateau est sur l’eau , que de pleurer des miettes quand le pse sera annoncé quand le bateau sera entrain de couler.
    Cela n’est que mon point de vue

  7. On est en plein dans la kakistocratie! Il serait temps que les puissants assument leurs incompétences et rendent des comptes!

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