À quelques jours de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, l’APEC et l’Agefiph publient une étude inédite intitulée “Révéler et faire reconnaître son handicap en entreprise”. Il en ressort notamment qu’une majorité de cadres ne révèlent pas leur situation de handicap à leur employeur de peur d’être stigmatisés, voire freinés dans leur ascension professionnelle.

7 % des cadres sont affectés par un handicap – a minima un problème de santé limitant leurs activités quotidiennes. Parmi eux, beaucoup ne souhaitent pas ou n’estiment pas nécessaire d’en parler à leur employeur. Pourtant, « il faut faire tomber les tabous afin de créer un climat où chacun et chacune se sente libre de révéler son handicap sans crainte », assène Gilles Gateau, directeur général de l’Apec.

Ralentissement de la carrière

Les raisons de cette dissimulation volontaire sont multiples. Dans un contexte de travail où la performance est survalorisée, ils redoutent d’être stigmatisés, jugés moins compétents, voire carrément ralentis dans leur carrière professionnelle. « Depuis la révélation de mon handicap, ma carrière s’est stoppée net. Je n’ai plus aucune proposition, parce que je ne peux plus travailler à temps plein », confie de manière anonyme une salariée de 56 ans, exerçant dans une grande entreprise. C’est pourquoi, cacher la vérité reste parfois la seule option : « Je n’ai pas envie que mon état de santé contribue à me donner des missions moins intéressantes, en estimant que c’est pour mon bien », peste anonymement un salarié de 59 ans.

L’autre principale explication réside dans le fait que bon nombre de cadres ont une connaissance approximative, voire une méconnaissance totale, des droits associés à la déclaration de leur handicap. Ils ne savent pas, par exemple, qu’ils pourraient bénéficier d’aménagements organisationnels et/ou techniques. Cette problématique liée à l’évolution de carrière passe avant l’accès à l’emploi, d’après le 16ème Baromètre sur les discriminations dans l’emploi, publié par le Défenseur des droits en 2024.

Accélérer la prise en charge

Conséquence de ce tabou ? Seuls 2 % des cadres disposent d’une reconnaissance administrative de leur handicap, contre 5 % pour l’ensemble des actifs français. Ces premiers finissent par admettre leur handicap en entreprise uniquement lorsque la dégradation de leur santé devient trop difficile à supporter, ou trop coûteuse financièrement. Des aménagements de temps et d’organisation de travail, ou encore de poste, deviennent alors inévitables. Cette situation constitue néanmoins un bénéfice pour les entreprises désireuses d’accélérer le nombre de Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

« Il est fondamental de sécuriser leurs conditions de travail en mobilisant les aides et les services existants », affirme Didier Eyssartier, directeur général de l’Agefiph. Cette visibilité permet non seulement le maintien en emploi des salariés concernés, mais aussi une meilleure prise en charge tout au long de leur carrière. Cela passe par une bonne santé mentale et physique, en réduisant les efforts liés à la surcompensation liés à la dissimulation (stress, fatigue, douleurs). Mais aussi, par le bien-être au travail, en commençant par la préservation de relations qualitatives avec le manager et les collègues. Une fois informés, ils seront davantage enclins à être compréhensifs à l’égard du collaborateur en situation de handicap.

Changer de regard, pas si simple !

Si changer de regard, aussi bien à titre personnel que collectif, est indispensable pour favoriser l’essor d’entreprises plus inclusives, cette évolution semble laborieuse. Les Jeux paralympiques de Paris 2024, y ont contribué positivement, mais une majorité de cadres estiment toujours que les organisations devraient aller plus loin dans cette inclusion, selon une étude de l’APEC, diffusée en octobre 2024. Plus de la moitié (58 %) des cadres déclarent que les entreprises ne recrutent pas assez de personnes en situation de handicap, 54 % qu’elles ne favorisent pas suffisamment leur évolution professionnelle, et 52 % regrettent que les conditions de travail ne sont pas adaptées pour qu’ils puissent continuer de performer.

Source : Courrier Cadres

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