Françoise Gri, présidente de Manpower France, a son blog, c’est très tendance. Cela lui permet aussi de s’exprimer sur un support moderne et de passer un certain nombre de messages à destination de tous les publics, contrairement aux sites Internet et Intranet de l’entreprise.
Son article, au titre séduisant malgré le point d’interrogation, “L’intérim, annonciateur de reprise ?”, ne pêche pourtant pas par optimisme. Elle observe notamment que la relative reprise du travail temporaire s’effectue depuis des niveaux ramenés à ceux de 1998, c’est-à-dire biffant une dizaine d’années consécutives de hausse et pose le constat d’une baisse généralisée des durées de mission, tant dans l’industrie que le BTP ou le tertiaire.

Pour résumer, oui il y à reprise mais nous sommes bien loin de l’euphorie.

L’intérim, annonciateur de reprise ?

Les chiffres publiés par l’Insee vendredi témoignent d’un coup d’arrêt des destructions de postes au troisième trimestre, ce qui constitue une nouvelle aussi heureuse que surprenante, pour bien des raisons sur lesquelles on pourra revenir.

Dans l’immédiat, il apparait que cette quasi-stabilisation est due en grande partie à l’emploi intérimaire, dont la hausse, pendant cette même période, a été de 8,6%. Peut-on pour autant parler de reprise, ou de rebond comme je le lis déjà ici ou là ? Je pense qu’il convient d’être très prudent dans les termes et qu’il faut remettre quelques éléments en perspective. Un préambule tout d’abord : pour interpréter convenablement les chiffres de vendredi, il faut savoir que les intérimaires sont comptabilisés par l’Insee dans le secteur tertiaire, quelles que soient la nature et la destination de leurs missions. De facto, c’est donc le secteur tertiaire qui profite statistiquement de ce rebond de l’emploi intérimaire – et sa croissance ne serait que de 0,1% hors intérim. Quant à la construction et à l’industrie, ces deux secteurs ont encore perdu des emplois au 3ème trimestre…

Il y a donc 474 000 emplois dans l’intérim aujourd’hui. C’est « juste » 200 000 de moins qu’au premier trimestre 2008, avant la crise. Il est vrai qu’au deuxième trimestre de cette année, l’emploi intérimaire s’est stabilisé après un an de repli (et le terme de « repli » est un euphémisme, puisque le nombre de salariés intérimaires a baissé de 29 % en un an – et de plus de 40% dans l’industrie). Avec 436 600 salariés (soit 2,3% des salariés de l’ensemble des secteurs concurrentiels), l’emploi intérimaire s’est donc retrouvé fin juin à un niveau comparable à celui de la fin de 1998, effaçant ainsi dix années consécutives de hausse. Pouvait-on descendre plus bas ? Autrement dit, l’effondrement a été tel qu’on ne pouvait que remonter…un peu.

Et puis il y a un autre indicateur qu’il faut prendre en compte si l’on veut juger de la « vitalité » de ce rebond : c’est la durée des missions. Au deuxième trimestre, par exemple, si le nombre de missions dans l’industrie a effectivement légèrement progressé, leur durée a malheureusement continué à baisser, entrainé par la part croissante de missions de moins d’une semaine au détriment des missions d’au moins quatre semaines. Dans la construction ou le tertiaire, les durées moyennes des missions étaient elles aussi en baisse…

Bref, pour reprendre l’avertissement de l’Insee dans son « Portrait social 2009 », je considère effectivement qu’il « faudra un certain temps au système statistique pour appréhender l’ensemble des conséquences sociales de la crise économique et pour les mesurer avec les enquêtes structurelles ».

Françoise Gri

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