Du 29 juillet au 23 août, rediffusion du “meilleur de l’année”
Article publié le jeudi 24 janvier 2019

Entré
en vigueur le 1er janvier 2013 et supprimé en fin d’année 2018, puisque
remplacé par des allègements de charges sur salaires, le CICE (Crédit
d’Impôts pour la compétitivité et l’emploi) n’a visiblement, si l’on se
réfère aux chiffres officiels, amélioré de manière significative ni la
compétitivité, ni l’emploi. Les rares, ponctuelles et très limitées
embellies sur l’emploi ne sont dues qu’à une conjoncture internationale
porteuse ces dernières années. Dès 2014, une analyse intéressante parue
dans L’Expansion avertissait déjà de l’inefficacité du dispositif. Un
dispositif représentant quand même plus de 20 milliards d’euros par an,
c’est-à-dire la moitié des aides versées aux entreprises en France
chaque année (41 milliards d’euros). En 2017, une étude diffusée par un
organisme tout ce qu’il y a d’officiel estimait à 100 000 seulement le
nombre d’emplois sauvegardés ou créés. Or un calcul arithmétique permet de constater que ce
pactole de 41 milliards d’euros, s’il était intégralement affecté à
l’emploi, permettrait de créer 2,5 millions d’emplois rémunérés à 1 850
euros net par mois
, soit nettement plus que le SMIC. Ce serait donc
la fin du chômage de masse qui nous place dans le peloton de queue des
pays européens.




Qui veut gagner des millions ?


Nous avons encore en mémoire les exhortations de Pierre Gattaz, président du MEDEF, jurant mordicus
que l’allègement des charges, le crédit d’impôt et la libéralisation du
droit du travail permettraient de créer des millions d’emplois.
Souvenons-nous de la diffusion par cet organisme d’un pin’s affichant
hardiment “Je m’engage à créer un million d’emplois”. En gros le message
revenait à : démolissez le droit du travail, flexibilisez et précarisez
à fond le travail, limitez les salaires et, cerise sur le gâteau,
supprimez le SMIC et vous allez voir ce que vous allez voir ! Même plus
besoin de traverser la rue pour trouver du taf !




On
le sait aujourd’hui, l’essentiel du CICE a été affecté à l’amélioration
des fonds de roulement, la restauration des marges et l’augmentation
des dividendes versés aux actionnaires. Prenons l’exemple caricatural du
groupe de distribution Casino, empochant 97 millions de CICE tout en
réduisant à peu près du même montant ses frais de personnel et en
majorant très fortement la rémunération des dirigeants. Tout comme le
groupe Carrefour, par exemple.




200 millions d’euros par an pour combien d’emplois créés ou maintenus ?


Et
chez Adecco, où sont passés les plus de 200 millions d’euros perçus
chaque année au titre du CICE ? Dans l’emploi ? Cela se saurait.
L’effectif stagne et surtout se précarise depuis plusieurs années tandis
que se multiplient les départs plus ou moins volontaires. En 2019, les
allègements de charges viendront se substituer à ce crédit d’impôt pour
les salaires inférieurs à deux fois et demi le SMIC. Pourquoi d’ailleurs
limiter d’ailleurs les aides à ce plafond ? Nos dirigeants politiques
ne savent-ils pas que le développement de la robotisation et de la
digitalisation contribuent au transfert du travail vers des emplois plus
qualifiés et donc mieux rémunérés et qu’il convient par conséquent de
ne pas les exclure d’une politique de soutien à l’emploi ?




Le
véritable problème sinon scandale, c’est de continuer à “faire toujours
plus de ce qui ne fonctionne pas”, selon une formule connue. Continuer à
arroser de dizaines et de centaines de milliards les entreprises, sans
aucun contrôle ni contrepartie en même temps que les chômeurs doivent
rendre de plus en plus de comptes. Qui sont finalement les vrais
assistés en France ?


Tout
le monde s’accorde enfin mais un peu tard à reconnaitre que le CICE est
un échec patent. Imaginé par une petit cercle de technocrates du
“groupe de la Rotonde”, du nom du célèbre café dans lequel se
retrouvaient nos brillants cerveaux – notre Président y tenait déjà
table ouverte du temps où il œuvrait encore chez Rothschild –  le CICE
meurt de sa belle mort après avoir englouti des centaines de milliards
d’euros dilapidés sans aucun contrôle et en la quasi-absence de
résultats.




Le
CICE aura sans doute été, comme l’évoque le pourtant très révérencieux
journal La Tribune, un véritable scandale d’État, sans doute l’un des
plus grands de ces dernières décennies. Tous les rapports et analyses le
confirment : il nous a coûté “un pognon de dingue” – au moins 110
milliards d’euros – et a considérablement appauvri le pays sans aucun
résultat notable. Les allègements de charges pour 2019 ne sont hélas pas
plus conditionnelles et l’actionnariat des grands groupes semble avoir
encore de belles années devant lui…

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