Par Raphaëlle Bertholon, secrétaire nationale CFE-CGC en charge de l’économie, industrie, numérique et logement.
La crise du Coronavirus questionne notre modèle économique et
sa résilience. Ce virus est venu enrayer notre système basé sur la
globalisation des échanges, l’optimisation de la chaîne de valeur
prônant la gestion à flux tendus en norme de la performance économique.
Cette vision à court terme de la création de valeur a révélé qu’elle
emportait avec elle des risques majeurs menaçant l’équilibre qui régit
notre société. Au rang de ces dangers qui nous menacent figure la perte
de notre souveraineté (au sens de l’abandon de notre autonomie dans la
production d’activités stratégiques). Ce que la CFE-CGC dénonce
inlassablement, depuis plus de quinze ans, est apparu au grand jour,
touchant chacun de nous avec la crainte de ne pas pouvoir disposer de
médicaments pour être soigné.
années, comme nous le rappelions en septembre dernier lors de la
consultation sur le pacte productif. Ainsi écrivions-nous : « Les
délocalisations massives dans certains secteurs (répondant toujours à
cet objectif de réduction des coûts pour mieux maximiser les profits)
conduisent non seulement à des pertes d’emplois et de savoir-faire, mais
également à la perte de souveraineté sur des produits stratégiques.
L’exemple des pénuries actuelles de certains de nos médicaments en sont
une parfaite illustration et sont le résultat de délocalisations
massives, avec des dépenses hexagonales consacrées aux médicaments
produits en France passées d’un produit sur deux à un produit sur dix en
vingt-cinq ans ».
s’est invité, conforté par des sondages plébiscitant cette
relocalisation de nos productions industrielles. Pour la CFE-CGC, la
question primordiale est celle de l’emploi, à aborder dans sa globalité.
Nous ne souhaitons pas que le débat sur les relocalisations vienne
occulter celui des disparitions ou délocalisations actuelles qui,
profitant de la crise, s’opèrent en catimini. Les annonces récentes par
General Electric Belfort voulant délocaliser 30 % de l’activité
réparation rotor aux Etats-Unis et en Arabie Saoudite, ou encore la mise
en liquidation du dernier tunnelier français NFM après une
délocalisation en Chine, par son nouveau propriétaire, d’une partie de
sa fabrication ayant conduit à sa perte, sont deux parfaites
illustrations de ce phénomène !
PRÉSERVER L’EMPLOI POUR ÉVITER QU’AU DÉSASTRE ÉCONOMIQUE NE SUCCÈDE UN DÉSASTRE SOCIAL
Le gouvernement, avec son plan massif de soutien aux entreprises, a
affiché sa volonté de soutenir l’économie « quoiqu’il en coûte », sans
toutefois le conditionner à un engagement de mise en œuvre de moyens
pour préserver l’emploi. C’est désormais aux partenaires sociaux, dans
les entreprises, qu’il appartient de veiller à l’utilisation de cette
« dépense sans compter ». Car l’heure est avant tout à la préservation
de l’emploi, pour éviter qu’au désastre économique ne succède un
désastre social.
Bien évidemment, le temps de la relocalisation viendra, reconsidérant
l’ensemble des chaines de valeur sous l’angle prioritaire de
« l’autonomie procurée », et non plus de la seule « rentabilité
dégagée ». Cette autonomie a un prix à payer, celui du renchérissement
des coûts de fabrication. Pour gagner ce pari, il conviendra au
préalable de recenser les activités dites stratégiques, à supposer que
la bataille de leur préservation ait été gagnée. La situation actuelle
dans la filière « mines et métallurgie » nous laissent craindre le pire.
Il faudra également capitaliser sur les belles réussites d’adaptation
des chaînes de production, comme la crise a pu nous en procurer avec les
fabrications de masques, de gels ou de respirateurs.