Dépêche empruntée à lettre lettre AEF Info :
Sous l’effet du deuxième confinement décidé par l’exécutif fin octobre dernier, les pertes d’emplois salariés ont légèrement augmenté lors du quatrième trimestre 2020 (+21 000). Dans le même temps, le taux de chômage a enregistré une baisse notable (-1,1 point). À cette situation contrastée devrait succéder un tableau plus négatif au premier trimestre 2021, prévoit l’Insee dans ses perspectives économiques publiées le 11 mars : les destructions d’emplois pourraient s’accroître (-77 000) et le chômage repartir à la hausse (+0,5 point), la reprise restant contrainte par les restrictions d’activité.
“Généraliser la vaccination des populations adultes est la meilleure politique économique envisageable actuellement pour faire repartir nos économies et redynamiser l’emploi”, a déclaré la cheffe économiste de l’OCDE, lors de la présentation des perspectives de l’organisation internationale mardi 9 mars. Et Laurence Boone d’enfoncer le clou en expliquant que, “si nous n’arrivons pas à vacciner suffisamment de personnes assez rapidement pour permettre la levée des restrictions, la reprise sera plus lente et nous mettrons en péril les retombées bénéfiques de la relance budgétaire” à l’œuvre dans tous les pays membres de l’OCDE pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire.
La publication, deux jours plus tard, des projections économiques de l’Insee valide cette mise en garde, estimations chiffrées à l’appui. De fait, si le déploiement du plan de relance de 100 milliards d’euros décidé par l’exécutif français connaît une accélération significative depuis le début de cette année, les restrictions qui entravent encore l’activité dans de nombreux secteurs clés pour le pays perdurent depuis le reconfinement national instauré fin octobre 2020, auquel a succédé un couvre-feu national à 18 heures mi-décembre et, depuis le 26 février, des reconfinements locaux qui pourraient se multiplier.
Situation “tendue et inquiétante”
Jeudi 11 mars, soit un an après l’annonce de la fermeture de tous les établissements d’enseignement qui a précédé un confinement strict de deux mois, Olivier Véran a une nouvelle fois défendu la stratégie gouvernementale consistant à privilégier une réponse territorialisée pour lutter contre la reprise épidémique, plutôt qu’un retour au blocage général du pays dont le coût pour les finances publiques est de l’ordre de 15 à 20 milliards d’euros par mois. Le ministre de la Santé a, en même temps, qualifié l’évolution de la situation sanitaire de “tendue et d’inquiétante” dans trois régions rassemblant plus de 23 millions d’habitants : l’Île-de-France, les Hauts-de-France et Paca.
Olivier Véran n’a également pas caché que les capacités d’approvisionnement du pays en vaccins seraient moindres que prévu, comme l’ont fait savoir les fournisseurs aux autorités européennes qui gèrent ce dossier au niveau communautaire. Selon les dernières données publiées par la DGS (Direction générale de la santé), 6,7 millions de personnes ont reçu en France au moins une dose de vaccin, dont 2,16 millions de bénéficiaires d’une double injection. Or, dans leur très grande majorité, ces personnes ne travaillent pas, les actifs non vaccinés étant appelés à constituer pour plusieurs semaines encore le cœur de la population vulnérable.
91 000 emplois en moins au 1er trimestre
Selon les perspectives de l’Insee, le maintien des mesures de restriction décidé par le gouvernement depuis la levée du deuxième confinement aura des conséquences néfastes lors du premier trimestre 2021. “Au premier trimestre 2021, l’emploi salarié diminuerait de nouveau (–77 000)”, après -21 000 au quatrième trimestre 2020 et +426 000 au trimestre précédent pour une perte sur l’année de 284 000 postes.
“Si l’activité économique se redressait légèrement dans certains secteurs, le caractère durable de la crise conduirait les entreprises à progressivement renoncer à retenir de la main-d’œuvre dans leurs effectifs, en abaissant notamment l’ampleur de leur recours au chômage partiel. Les pertes d’emplois seraient essentiellement le fait de l’hébergement-restauration (–39 000) et des services aux ménages (–52 000)”, anticipe l’Insee.
Sachant que l’emploi non-salarié baisserait au même rythme que dans l’emploi salarié, “ce qui porterait au total les destructions nettes d’emplois (salariés et non-salariés) à –91 000 fin mars 2021 par rapport à fin décembre 2020 (après –323 000 entre fin décembre 2019 et fin décembre 2020)”. Mécaniquement, ces perspectives auront des conséquences négatives sur le taux de chômage qui a reculé de 1,1 point au dernier trimestre 2020 pour s’établir à 8 % au sens du BIT, après une hausse de 2 points au troisième trimestre.
Remontée du chômage d’ici fin mars
Cette baisse du nombre de chômeurs enregistrée entre fin septembre et fin décembre de l’année dernière découle d’une “bonne tenue de l’emploi”, mais aussi d’un comportement de retrait d’activité lié aux mesures de restrictions sanitaires du deuxième confinement. “Pendant cette période, des personnes sans emploi ont cessé de rechercher activement un emploi (par exemple parce que leur secteur d’activité privilégié était à l’arrêt), ce qui suffit à ne plus les classer comme chômeurs au sens du BIT. Ce retrait d’activité, bien que significatif, a été néanmoins d’ampleur bien plus réduite que celui observé lors du premier confinement”, relève l’Insee.
Or, début 2021, “le comportement d’activité reviendrait en partie à la normale (+196 000 actifs de 15 ans et plus, après –176 000 au quatrième trimestre), la fin du deuxième confinement permettant à certaines personnes de reprendre des recherches actives d’emploi. Dans le même temps, l’emploi serait quasiment stable en moyenne trimestrielle (+16 000). En conséquence, le taux de chômage rebondirait et s’établirait à 8,5 % en moyenne” fin mars 2021, “soit 0,7 point de plus qu’un an auparavant et 0,4 point au-dessus de son niveau d’avant-crise fin 2019”.
À coup sûr, ces prévisions seront mises en avant par les organisations syndicales pour continuer à contester les arbitrages présentés le 2 mars par le gouvernement et qui vont conduire à durcir progressivement les conditions d’indemnisation de quelque 800 000 chômeurs à compter du 1er juillet prochain (lire sur AEF info). Rendez-vous lundi 15 mars pour une nouvelle conférence du dialogue social rassemblant à Matignon syndicats et patronat.
Source : AEF info