Il y a du réaménagement dans l’air à Adely, au siège de l’entreprise, en vue d’un mode d’organisation dit flex office. On parle aussi de “desk sharing” pour les anglicistes distingués, communauté à laquelle nous déplorons bien entendu de ne pas appartenir. Évidemment les élus vont être consultés puisque la législation l’impose mais consultés sur quoi ? Une consultation loyale suppose une information suffisamment complète sur les enjeux, les impacts, les variations d’effectifs et les conditions de travail qu’impliquent le projet. Est-ce et sera-ce le cas ?

Il faudrait peut-être déjà commencer par définir clairement en quoi consiste le flex office dont le principe central consiste à déposséder tout salarié d’un bureau, d’un lieu de travail attitré. Les expressions “je suis dans mon bureau” ou “je vais à mon bureau” appartiendront bientôt au magasin des antiquités et feront figure d’incongruité sémantique. Le développement exponentiel du télétravail, conséquence des périodes de confinement et restrictions en tous genres – notamment dues à la crise dite sanitaire -, le travail de plus en plus nomade et l’augmentation du nombre de salariés à temps partiel ont convaincu nombre d’employeurs de réduire la voilure en partageant différemment les espaces de travail pour mieux les réduire. Avec, à la clef, de précieux gains de mètres carrés et de locaux puisque le raisonnement consiste à adapter la surface des locaux au nombre de salariés présents en même temps et non aux effectifs dont, par roulement, une partie se trouve perpétuellement absente. Fini donc les bureaux attitrés avec photos, objets personnels et éventuellement le bocal de Bubulle : vous ne faites que passer, vous n’êtes de nulle part et rien ne vous appartient, qu’on se le tienne pour dit ! Le concept n’est pas sans rappeler les paroles de “Société anonyme”, une très vieille chanson d’Eddy Mitchell dont le refrain répétait en boucle : “Rien n’est à toi, tu ne vaux pas un seul centime, tout appartient à la Société Anonyme”.

L’entreprise dispose bien entendu de solides arguments destinés à convaincre tout un chacun de la nécessité de tourner la page d’une ère où chacun disposait naturellement de son espace de travail auquel, le plus souvent, il tenait farouchement car il lui offrait un semblant d’appartenance, un petit “chez soi” professionnel. Bien sûr, il n’oubliait jamais vraiment que, salarié il repartirait un jour comme il était venu et ne possédait pas même sa chaise, ni son agrafeuse mais cette parcelle de territoire concédée lui offrait néanmoins un bien modeste sentiment d’appartenance.

Parmi les arguments forts de la direction, le mode d’organisation flex office imposant un changement permanent de voisins de travail permettrait de rencontrer de nouvelles personnes et de remédier à la routine. Bon. L’information circulerait aussi plus rapidement et nous reconnaissons là l’argument qui présida à la mise en place des “open spaces” et à la suppression des bureaux pour nombre de managers. Les principaux intéressés semblent plutôt partagés sur le sujet d’une meilleure communication… Il suffit de leur demander. L’argument le plus solide mais le moins mis en avant, on se demande bien pourquoi, concerne la réduction des coûts immobiliers pour l’entreprise par la diminution substantielle des surfaces louées.

Inconvénients et risques du flex office

Il s’agit cette fois d’inconvénients pour les salariés, comme le sentiment d’être devenu totalement interchangeable et, notamment, de ne plus pouvoir personnaliser son espace de travail. En changer chaque jour, avec nouveau fauteuil, nouvel écran, nouvelle disposition, génère ou aggrave un sentiment de nomadisme et la désagréable sensation de n’être rien et de nulle part dans l’entreprise. Par ailleurs, il n’est pas difficile d’imaginer les crispations quotidiennes dans une sorte de course pour la meilleure place, le meilleur matériel ou environnement, le meilleur voisinage et donc le risque accru de nouveaux conflits.

Quant à la communication, nous y reviendrons tant le sujet est important, est-on vraiment certain que le changement de collègues chaque jour contribue à son amélioration ? Poser la question c’est y répondre.

Demain, sur ce site, une mise à jour qui va décoiffer… A découvrir sans faute mais à déconseiller toutefois aux enfants, aux personnes émotives, aux femmes enceintes, aux seniors de plus de 97 ans et demi et aux quadruples dosés. Bref, à toute personne fragilisée.

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