Du lundi 25 juillet au mardi 23 août rediffusion du meilleur de l’année
Article paru le 15 novembre 2021

Il fallait s’y attendre, nous l’avions annoncé et ce sera le deuxième « effet kiss cool » : après avoir bridé au maximum le système de calcul de la part variable de rémunération par de savants calculs, il ne restait à la direction qu’à fixer des objectifs « ambitieux », si ambitieux qu’ils contribueraient à réduire arithmétiquement le montant de la part variable. C’est maintenant chose faite. Rien de nouveau sous le soleil et nous nous apprêtons à une année 2022 difficile… tout au moins pour les salariés.

Pour l’entreprise, 2022 serait plutôt une année faste si l’on en croit les confidences de quelques Directeurs de zone. Elle affiche des ambitions financières élevées, comme si rien n’était, comme si nous n’avions à affronter à aucune pénurie de main-d’œuvre, aucun sous-effectif dans le réseau, aucune attaque de nos clients par notre filiale digitale QAPA. Tout va très bien Madame la marquise, dormez en paix. L’un d’eux nous a plus précisément confié son désarroi face au niveau de fixation des budgets de l’an prochain. « Ils sont démentiels », « hors-sol », « surréalistes » n’en finissait-il pas de nous asséner. « Ce sont des fous furieux » a-t-il conclus à la fin de nos échanges tout en nous précisant que la plupart de ses collègues se trouvent dans le même état d’esprit que lui. La révolte gronde dans l’encadrement intermédiaire, en est-on conscient dans le bunker directorial ? D’ailleurs, il faut savoir que l’ensemble des Directeurs de zone ont reçu les budgets 2022 mais que très peu se sentent aujourd’hui en mesure de les présenter à leurs équipes. Il faut dire qu’imposer une augmentation de 18% du chiffre d’affaires comme de la marge brute et de plus de 35% de l’Ebita, il fallait oser. Ils ont osé.

Selon notre contact, la direction ne s’avoue capable d’expliquer, par le prix notamment, qu’un modeste tiers de cette progression, ignorant tout de la façon dont on pourrait bien atteindre les deux autres tiers. Excepté le Saint-Esprit et la magie blanche, il faut bien reconnaître que notre imagination nous fait défaut. Sans embaucher, alors que l’un de nos principaux concurrents se donne les moyens en recrutant à tour de bras, sans aucun moyen supplémentaire et en continuant de fermer des sites, il faudrait donc augmenter de près de 20% le volume d’affaires et de marge brute. Comment sera-ce possible Messieurs les Président et Directeur général alors que les équipes sont au taquet et que nous atteignons déjà des records de productivité ?

La direction s’enferre et s’enferme dans un discours autistique, auto-justifié par un inquiétant déni du réel. Elle ânonne en boucle des incantations à la profitabilité et à la création de valeur sans jamais pouvoir exciper de la moindre politique qui permettrait pareille progression, ni de la plus ténue des stratégies en faveur des salariés, de leur rémunération et de leurs perspectives. Ses représentants semblent ne plus adhérer eux-mêmes aux directives d’un « board« , claquemuré à Zurich, non bien éloigné de Davos.

Nous savons de source sûre que quelques Directeurs de zone, conscients des limites de l’exercice qui leur est imposé, tentent en ce moment un baroud d’honneur et une ultime négociation auprès de leur Directeur opérationnel afin d’essayer d’obtenir un retour en douceur au réel et à la raison. Seront-ils entendus ?

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