La 14ème édition de notre baromètre « Santé des salariés et qualité de vie au travail », réalisé par Ipsos, observe de nouveau un état de santé général stable chez les salariés. Cependant, il révèle une réalité plus nuancée.
Quels sont les principaux résultats de ce baromètre ?
Cette 14ème édition de notre baromètre(1) révèle que les salariés sont de plus en plus satisfaits de leur travail et de leur qualité de vie au travail. De plus, la grande majorité des salariés (65 %) déclare être en bonne ou très bonne santé. Ce chiffre, toujours élevé, baisse cependant régulièrement.
Derrière cette tendance, se cachent deux phénomènes principaux : la dégradation de la santé mentale, notamment chez les femmes, et l’augmentation des maladies chroniques dont on peut faire l’hypothèse qu’elles vont continuer à progresser avec le vieillissement de la population active. Ces enjeux sont autant de fragilités qui impactent fortement le travail selon les salariés et pourraient éloigner certains de l’emploi.
À titre d’exemple, 22 % des salariés déclarent souffrir d’une maladie chronique et pour 70 % d’entre eux, cette maladie a des répercussions sur leur travail.
Quelle est la source du « mal-être » ressenti par les salariés ?
Les salariés présentant un état de santé mentale fragile l’expliquent par des problèmes personnels pour un tiers d’entre eux, par des problèmes professionnels pour un autre tiers, pour les autres, les problèmes personnels se conjuguent à ceux d’origine professionnelle.
Les raisons personnelles sont avant tout liées aux situations familiales (37 %) (parents s’occupant seuls de leurs enfants, salariés s’occupant d’un proche dépendant, décès) et financières compliquées (33 %).
Quant aux motifs professionnels, c’est avant tout l’intensité et le temps de travail (62 %) qui sont mis en avant devant les conflits internes (40 %) : les craintes liées à une surcharge de travail, en raison de sous-effectifs, inquiètent près d’1 salarié sur 2 (46 %). Ils sont aussi nombreux à déplorer une moins bonne gestion de leur charge et temps de travail : 45 % des salariés déclarent avoir du mal à gérer leurs priorités (+8 points), un score historiquement élevé. Les plus touchés sont les managers (54 %), les cadres (54 %) et les moins de 30 ans (52 %).
Cela peut expliquer en partie l’empiètement déclaré de leur vie professionnelle sur leur sphère privée : 30 % déclarent ainsi travailler de plus en plus souvent chez eux, en plus des horaires de travail (+7 points en 10 ans) et près de 2 salariés sur 5 consultent leurs mails en dehors du travail (+19 points en 10 ans). Dans ce baromètre, ces 2 indicateurs sont ceux qui évoluent le plus depuis 10 ans.
On observe ainsi depuis près de 10 ans un rapport au travail, ou du moins une organisation de travail dans laquelle la frontière entre vie personnelle et vie professionnelle s’estompe.
Y a-t-il des salariés davantage touchés que les autres ?
Les jeunes semblent particulièrement touchés : 29 % des moins de 30 ans déclarent avoir vécu un burn-out. Ils sont plus nombreux à citer la vie personnelle comme origine de leur mauvaise santé mentale : les plus jeunes expliquent principalement leur fragilité par une situation financière compliquée et par l’isolement social.
Et du côté des femmes, les indicateurs ont tendance à s’affoler à l’heure où l’Assemblée nationale a rendu son rapport sur la santé mentale des femmes jugeant indispensable de la replacer au cœur des politiques de santé publique.
44 % des femmes déclarent ainsi avoir une moyenne/mauvaise santé mentale vs 32 % des hommes. Elles sont particulièrement concernées par :
- les troubles du sommeil/insomnies (51 % des femmes vs 43 % chez les hommes)
- la fatigue chronique (46 % vs 36 %)
- et les troubles anxieux (37 % vs 28 %)
Le rapport sur la santé mentale des femmes part du constat que ce sujet constitue une thématique trop peu explorée, ou de manière parcellaire, sans qu’une réflexion globale n’ait réellement été engagée.
Le rapport souligne également que la santé physique occupe une place prépondérante dans les politiques de santé publique, au moyen de campagnes axées sur la prévention et l’hygiène de vie – là où la santé mentale ou les troubles psychologiques souffrent toujours d’une forte stigmatisation, qui conduit souvent à l’invisibilisation des personnes qui en souffrent.
Or, les problèmes de santé mentale constituent aujourd’hui le premier poste de dépenses de l’Assurance maladie, avec un coût annuel de 23,4 milliards d’euros.
De leur côté, quels types d’actions peuvent mener les entreprises ?
Malgré les attentes des salariés, pour seulement la moitié d’entre eux, le manager s’intéresse à leur santé mentale.
Agir sur la santé mentale semble compliqué pour certaines entreprises car elle parait relever de l’intime mais il n’y a pas de santé sans santé mentale. C’est un enjeu majeur et des solutions existent.
De plus, la santé des salariés est plus qu’un enjeu légal : elle questionne notamment la RSE des entreprises mais c’est sa performance qui est également en jeu. La santé de l’entreprise est liée, sans conteste, à la santé de ses salariés. D’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) met ce lien en exergue lorsqu’elle définit la santé comme : un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté ».
Face à ces différents constats, les entreprises peuvent agir, et les femmes sont particulièrement en attente de solutions de la part de leur employeur.
Elles expriment notamment un intérêt marqué pour les services concernant la santé mentale : 65 % d’entre elles souhaitent bénéficier d’un soutien psychologique en cas de difficultés personnelles ou professionnelles, contre 57 % des hommes. Les femmes sont également davantage intéressées (70 % contre 55 % chez les hommes) par des dispositifs favorisant la gestion du stress tels que le yoga, la méditation et la sophrologie. Les salariées sont également en attente de services de prévention : être mieux dépistées sur les maladies graves ou certains facteurs de risque (pour 63% d’entre elles), être conseillées pour améliorer leur hygiène de vie (alimentation, activité physique, sommeil, sevrage tabagique…) pour 59 % d’entre elles. Elles souhaitent également être accompagnées en cas de maladies graves (71 %) et au moment de leur retour au travail après un arrêt maladie (64 %, en hausse de 6 points par rapport à 2022).
Protéger la santé des salariés permet d’entrer dans un cercle vertueux au sein duquel nous avons tous un rôle à jouer.
Source : Malakoff Humanis
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