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Article paru le 13 novembre 2023
D’année en année, les enquêtes de satisfaction des salariés chez Adecco révèlent un niveau d’insatisfaction élevé et quasi-constant sans que cela ne semble devoir provoquer le moindre sursaut, la moindre inflexion dans la gouvernance de l’entreprise. Cette année fait exception avec une très légère amélioration de certains scores et notamment du “True Benchmark” et du “Score Engagement“, respectivement chacun de +0,2. Notons qu’il n’a même pas été pris le soin ou la peine de traduire ces expressions anglo-américaines en français, ce qui relève à minima d’un manque de tact.
Mais venons-en à l’essentiel, l’enquête annuelle Peakon reflète-t-elle véritablement les pensées, sentiments et ressentis des salariés s’y soumettant ? C’est la question première qu’il importe de se poser avant toute analyse un peu plus subtile et surtout avant de tenter une réponse à la seconde, tout aussi primordiale : les enquêtes Peakon sont-elles rigoureusement anonymes ? Les deux questions sont intimement liées, la réponse à la seconde déterminant le niveau de sincérité des répondants et par conséquent la validité même du processus.
Tout dépend, bien entendu, de l’acception que nous attribuons à la notion d’anonymat et par conséquent de confidentialité. Nous avons à plusieurs reprises évoqué un certain manque de confidentialité dans le traitement des enquêtes GPTW, jusqu’à en railler l’acronyme (Garde Prête Ta Winchester) dans un certain nombre d’articles aisés à retrouver en tapant simplement GPTW dans la barre de recherche de ce site.
Mais l’enquête Peakon – prononcer “piconne” afin d’éviter toute phonétique désobligeante – est-elle pour autant davantage anonyme et est-il réellement plus ardu d’identifier les répondants critiques ? Rien n’est moins certain et nombreux sont nos collègues approchés par leur hiérarchique direct aux fins d’évoquer des réponses jugées négatives voire désobligeantes de leur équipe, même s’il est théoriquement impossible d’identifier tel ou tel répondant si l’on s’en tient aux présentations officielles de l’outil. Officiellement, il serait en effet impossible de cibler tel ou tel sondé si l’on en croit le narratif officiel : “Il est impossible pour vos collègues, votre manager ou qui que ce soit dans votre organisation de savoir qui a donné une certaine réponse ou fait un certain retour. Les réponses sont regroupées afin que les individus ne puissent pas être identifiés”. Soit, mais alors pourquoi un certain nombre de nos collègues cadres, managers, Directeurs d’agence ou de Hub ont-il était approchés par leur hiérarchique direct pour s’expliquer sur les réponses jugées négatives de leur équipe ? La colossale subtilité consiste à prétendre que c’est la structure (à partir de trois répondants) qui est discernée et non les répondants eux-mêmes. Argument spécieux pour qui connait les agences et le fonctionnement d’équipes réduites. Pour une structure de quatre permanents, par exemple, qui pourrait nous faire gober que l’on n’identifierait pas immédiatement le collègue particulièrement critique ? Un collègue parfaitement neutre toute l’année, pourquoi pas enthousiaste même, limite gros fayot, et qui, une fois l’an, se lâcherait pour se métamorphoser en dénigreur masqué ? A qui pourrait-on faire croire pareille incongruité ?
Imaginons maintenant, mais ce n’est bien entendu qu’une supposition, que la méfiance se soit invitée dans le réseau à l’égard de ce type d’enquête : quelle peut être alors la réaction du collègue normalement constitué et pas plus téméraire que cela ? Ne pas répondre ? Non, ce serait se faire repérer sinon comme opposant, tout au moins comme collaborateur pour le moins désinvolte, d’autant que ce ne sont pas les relances et appels à remplir l’enquête qui manquent. S’exprimer négativement et sans fard ? C’est, comme nous l’avons vu, accepter de se faire repérer, sans doute sermonner et pourquoi pas entrer dans le collimateur. Que reste-t-il alors comme dernière option ? Répondre sagement en pondérant ses notations et commentaires. N’être ni excessivement pour, ni furieusement contre. Mais, si l’on adopte cette hypothèse de prudence contrainte que vaut encore pareille enquête ? Question posée au Codir. Ni documents, ni internet et ramassage des copies dans quatre heures.