Réunis par le gouvernement pour faire évoluer l’assurance chômage, syndicats salariés et patronaux se sont mis d’accord. Ils ont également trouvé des pistes sur l’emploi senior. L’accord doit maintenant être ratifié en interne dans les organisations, puis par le gouvernement.
400 millions d’économies dès 2025, c’est ce que devaient trouver représentants des salariés et du patronat lors de cette négociation, à la demande du gouvernement. Un accord a finalement été trouvé jeudi 14 novembre, même si tous les syndicats ne devraient pas le signer. Il reprend l’essentiel de l’accord conclu à l’automne 2023, qui n’était jamais entré en vigueur car le gouvernement de l’époque avait subordonné cet accord à la conclusion d’un autre accord, sur l’emploi senior. Celui-ci n’ayant pas abouti, l’exécutif avait alors repris la main et proposé une nouvelle réforme de l’assurance chômage, tombé aux oubliettes avec les élections législatives anticipées.
Le gouvernement Barnier a redonné la main aux partenaires sociaux, et si cet accord est validé en interne par les syndicats puis par le gouvernement, il entrera en vigueur le 1er janvier 2025. Il prévoit 395 millions d’euros d’économie pour 2025 : 260 millions d’euros ciblant les travailleurs frontaliers, et 135 millions d’euros de report de cotisations patronales. Au global, ce plan devrait dégager 2,5 milliards d’euros d’économie entre 2025 et 2028, pour un régime déjà excédentaire.
Les seniors et les transfrontaliers plus touchés
De par cet accord, les droits des demandeurs d’emploi seniors vont diminuer, dans le sillage de la réforme des retraites qui porte de 62 à 64 ans l’âge légal de départ. Jusqu’à présent, alors que les allocations chômage peuvent être versées durant 18 mois pour le cas général, les demandeurs d’emploi de 53 et 54 ans y ont droit pendant 22,5 mois, et ceux de 55 ans et plus, durant 27 mois. Ces règles vont être décalées de deux ans : il faudra avoir 55 ans pour être indemnisé durant 22,5 mois, et 57 ans pour y avoir droit durant 27 mois, hormis en outre-mer où les règles ne bougeront pas. Ces durées continueront d’être soumises au principe de contracyclicité entré en vigueur en février 2023 : si le chômage dépasse 9%, le droit au chômage sera respectivement de 30 et 36 mois pour ces seniors. Le dispositif permettant aux chômeurs en fin de droit de continuer à percevoir leur allocation jusqu’à l’atteinte l’âge du départ à taux plein à la retraite va également être décalé, de 62 ans actuellement à 64 ans. Il est cependant précisé que ces mesures « sont mises en œuvre de manière articulée avec la mise en place effective ». Cela signifie que si la réforme des retraites était abrogée, ces décalages seraient également annulés.
Une autre mesure va affecter les travailleurs transfrontaliers : jusque-là, quand un salarié français perd son emploi de l’autre côté la frontière, son allocation au chômage est calculée sur son salaire intégral, qui peut selon les pays être beaucoup plus élevé que pour un poste équivalent en France. Avec la réforme, le salaire se verra appliqué un coefficient proportionnel à la différence entre le salaire moyen de l’Etat où travaillait le salarié et le salaire moyen français. Cela réduira par exemple l’allocation de 40% pour les demandeurs d’emploi ayant travaillé en Suisse.
Par ailleurs, pour tous les allocataires, l’allocation sera désormais versée sur trente jours, quel que soit le nombre de jours réels dans le mois, alors que le calcul se faisait jusqu’à présent sur ce nombre réel de jours. Les chômeurs indemnisés perdront donc cinq ou six jours d’allocation chaque année.
Côté patronat, l’accord acte un report de quatre mois de la baisse de 0,05 point du taux de cotisation patronale, initialement prévue le 1er janvier 2025. Cette baisse entrera finalement en vigueur au 1er mai 2025.
Quelques progrès sont à observer pour les demandeurs d’emploi, déjà présents dans l’accord de 2023. Le principe de dégressivité de l’allocation pour les chômeurs à haut revenu ne s’appliquera qu’aux moins de 55 ans, contre moins de 57 actuellement. Les travailleurs saisonniers et les primo-inscrits devront avoir cotisé cinq mois, contre six pour le cas général, au cours des 24 derniers mois, mais cela demandera une modification législative du gouvernement. Le mode de calcul du salaire journalier de référence entré en vigueur en 2021 sera aussi atténué pour ces allocataires, car cela avait conduit à une forte baisse de leur allocation.
Quelques mesures pour l’emploi des seniors
Enfin, un autre accord signé en parallèle prévoit quelques timides mesures pour l’emploi des seniors. La principale concerne la retraite progressive, qui permet de cumuler un salaire à temps partiel avec une partie de sa retraite, à partir de 60 ans. Il est cependant indispensable d’avoir l’accord de l’employeur pour le mettre en place. Les syndicats souhaitaient un « droit opposable » à la retraite progressive, mais l’accord prévoit finalement que l’employeur devra justifier une « incompatibilité de la durée de travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise » pour la refuser.
Un rendez-vous de « dernière partie de carrière » sera organisé entre 58 et 60 ans pour aborder ce sujet. Ainsi qu’un rendez-vous de mi-carrière pour « aborder l’adaptation ou l’aménagement des missions et du poste de travail, la prévention de situations d’usure professionnelle, les éventuels souhaits de mobilités ou de reconversion professionnelle ». Le texte prévoit aussi une obligation de négocier tous les trois ans dans les branches professionnelles et les entreprises de plus de 300 salariés au sujet de l’emploi et du travail des seniors.
Un « contrat de valorisation de l’expérience », nouveau nom du CDI senior, est également prévu à titre expérimental durant cinq ans. Une entreprise recrutant un demandeur d’emploi de plus de 60 ans (57 ans en cas d’accord de branche) pourra lui demander un document de l’assurance retraite « mentionnant la date prévisionnelle d’obtention » du taux plein. A cette date, l’entreprise pourra alors mettre le salarié à la retraite d’office, ce qui n’est pour l’instant possible qu’à partir de 70 ans. A compter de 2027, les entreprises pourraient aussi être exonérées contribution patronale spécifique due lors d’une mise à la retraite, équivalente à 30% des indemnités versées au salarié. Mais cela sera conditionné à une approbation des organisations signataires dans le cadre d’un comité de suivi.
Source : Cadremploi