Impossible de nier la situation d’hyperconnexion du monde du travail actuel, dans quelque domaine d’activité que ce soit et bien qu’à des degrés divers. Le droit à la déconnexion consacré par la législation depuis 2017 devrait permettre, tout au moins en théorie, de protéger les salariés d’un certain nombre de risques pour la santé, à supposer que soit efficacement délimitées vie professionnelle et vie personnelle.

Le droit à la déconnexion, loi Travail du 8 août 2016, applicable depuis le 1er janvier 2017, reconnait et garantit le droit pour tout salarié de ne pas être connecté à un outil numérique professionnel en dehors de son temps de travail, qu’il s’agisse de messagerie professionnelle, d’applications et logiciels divers, sur PC, téléphone ou tablette, et que l’outil lui-même soit fourni par l’entreprise ou personnel. Il s’agit, comme évoqué dans l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 26 novembre 2020 dans son article 3.1.3, de garantir le respect des temps de repos et de congé, protéger ainsi la vie personnelle et familiale du salarié et préserver sa santé.

Et les cadres dans tout ça ?

La fonction même des cadres les expose davantage que toute autre catégorie professionnelle à une hyperconnexion favorisée par leur relative autonomie dans l’organisation de leur travail et leur disponibilité doublement attendue par leurs équipes et leur direction. Nombreux sont ceux qui s’imposent eux-mêmes une obligation de résultat décorrélée de toute notion de temps de travail. Rappelons à ce sujet que seuls les cadres au forfait-jour ne sont pas tenus au respect d’horaires de travail et, par conséquent, tous les autres relèvent, à même mesure que les employés et ouvriers, d’un horaire de travail à respecter. Et pourtant, lors de nos visites en agence, combien de fois entendons-nous encore des remarques du genre “(…) De toute façon, je suis cadre, je n’ai pas d’horaire”. Certains mythes ont la vie dure…

Il revient à l’employeur et à la direction de faire respecter les durées maximales de travail, garantir les temps de repos, réguler la charge de travail, veiller à la santé physique et mentale et à la sécurité de ses salariés et respecter la vie privée du salarié. Il doit, de plus, évaluer et intégrer au Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) les risques spécifiques liés à l’hyperconnexion.
Mais tout ceci ne demeure qu’au niveau des vœux pieux si ne sont pas précisément définies les périodes de déconnexion et les règles d’utilisation des outils numériques assorties d’actions de formation, de sensibilisation et surtout d’évaluation régulière de la charge de travail. Ceci questionne évidemment sur le niveau de cette charge de travail, des objectifs impartis et de leur réalisme ainsi que des moyens mis à disposition du cadre.

Télétravail et risques d’hyperconnexion

Bien que logiquement plus délicate à observer, la distinction entre temps de travail et temps de repos doit être particulièrement clarifiée pour les cadres en télétravail qui ont tout autant droit à la déconnexion que les autres, raison pour laquelle l’employeur doit évaluer et intégrer au DUERP les risques spécifiques liés au télétravail, à l’isolement, les plages horaires de disponibilité et donc le délicat tracé des frontières entre vie professionnelle et vie personnelle.

En définitive, le droit à la déconnexion constitue une avancée juridique significative pour protéger les cadres des risques d’hyperconnexion, à condition toutefois de ne pas s’en tenir aux discours et aux bonnes intentions affichées et à la tentation démagogique. C’est une transformation profonde des pratiques managériales que nous évoquons et à laquelle doit répondre la culture d’entreprise, appuyée par un dialogue social de qualité.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici